Comment choisir un jeu de rôle pour jouer en ligne ? (2/2)
Le jeu de rôle en confinement – partie 3

Troisième épisode officiel de la série d’articles sur le jeu de rôle pendant le confinement. Quel jeu adopter ? Si nous choisissions un jeu sorti récemment ?

Article mis en ligne le 21 juin 2020
dernière modification le 5 octobre 2021

par Laurent

Après avoir fait le tour des jeux disponibles dans ma cave (voir l’article qui en parle), je n’avais pas encore arrêté mon choix. Peut-être pourrions-nous partir sur une nouveauté ou une réédition ? C’est peut-être de ça que l’on a besoin pour notre partie en ligne.

Enfin, après avoir fait le tour des possibilités, c’est sur un système de jeu un peu particulier vers lequel je me suis tourné. Vous retrouverez ce choix en fin d’article.

Permalien : http://www.acadamia.org/article386.

Achats compulsifs

Quand on est un rôliste, c’est pour la vie. Même quand il ne joue pas, même quand sa période d’inactivité a duré plusieurs années, le rôliste reste un lecteur assidu de ce qui se fait dans le milieu. Il continue à faire des achats compulsifs de jeux et de suppléments de jeux, alors qu’il n’est même pas sûr de pouvoir jouer avec sa ludothèque. Au moins, il pourra s’immerger dans les mondes imaginaires dans lequel un de ses personnages pourrait évoluer.
C’est la raison pour laquelle, moi et certains représentants de ma communauté (dont certains ici se reconnaîtront) continuons à être à l’affût des nouveautés et cédons quelques fois à nos bas instincts compulsifs de consommateur.

Comme je l’ai expliqué dans l’article sur le renouveau du jeu de rôle, comme beaucoup d’ancien rôlistes, j’ai cédé aux sirènes du foulancement. Et comme tout adulte qui se respecte, je voulais jouer avec mes nouveaux jouets.

Image libre de doit trouvée sur Pixabay

Point sur les nouveautés acquises récemment

En réalité, je n’ai pas cédé sur de réelles nouveautés. Ce sont surtout des rééditions de jeux auxquels j’avais déjà joué vers lesquels mes choix se sont portés. C’est notamment quand j’ai vu la qualité éditoriale de ces nouvelles éditions que j’ai craqué.

**Rêve de Dragon

Description
Le monde est un rêve de dragon. Les dragons rêvent et les personnages sont l’objet de leurs rêves. Quand une personne meurt, c’est parce qu’un dragon se réveille. Si les dragons se réveillent en masse, des cataclysmes se déclenchent sur le monde. Le monde de Rêve de Dragon est donc protéiforme, intangible. Il est possible de passer d’un rêve à l’autre. C’est ce qui peut déranger certains joueurs.
Ce jeu est un très bon souvenir. Très onirique, très poétique. Le système de magie est vraiment très original avec sa carte des Contrées du Rêve.
En l’achetant, je pensais qu’ils allaient moderniser les règles. Les rendre plus fluides et plus en phase avec la mode actuelle. Cela n’a pas été le choix éditorial qui a été fait. La gestion de la magie est toujours aussi incroyable, mais rend le jeu un peu moins rythmé pour qui n’incarne pas un magicien.

Logo de RDD

Réédition
Cette version m’a rappelé qu’il s’agissait d’un jeu de rôle de la première génération. Les règles sont assez compliquées et les éditeurs n’ont pas tenté de les moderniser.
L’édition est très belle. Les anciennes l’étaient aussi, mais ici on sent (comme pour de nombreux projets en foulancement récents) qu’un gros travail de montée en gamme a été effectué.
Opinion
Le livre de base abrite toutes les règles et, passé le bestiaire, il manque à mon sens des éléments de contexte et des descriptions de l’univers. Le jeu nécessite donc des suppléments (et notamment des scénarios) pour exploiter Rêve de Dragon à fond. À moins de développer son propre univers, comme on le ferait avec un Donjons & Dragons.

  • Les + : Le système de magie, le côté poétique, les illustrations de Rolland Barthélémy et de Florence Magnin.
  • Les - : L’univers non persistant, les règles à l’ancienne très années 80.

**Paranoïa, l’édition post-post-post-moderne

Que de parties hilarantes, pleines de fous-rires, j’ai pu jouer avec Paranoïa. Je n’ai jamais eu le jeu en ma possession. Alors, quand j’ai appris qu’il ressortait enfin, je me suis précipité.

Description
Vous êtes un clone. Vous vivez dans le Complexe Alpha, une vaste base souterraine construite par on ne sait qui, pour une raison qu’on ignore. Le Complexe Alpha est contrôlé dans sa totalité par un Ordinateur omniscient. Il vient de vous nommer Clarificateur d’accréditation Rouge. Votre rôle est de lutter contre des terroristes, ennemis de l’Ordinateur, qui veulent saboter le complexe. Vouloir connaître la raison de cet enfermement ou vouloir sortir à l’extérieur du complexe est passible de haute trahison. Puisque l’Ordinateur vous dit que l’extérieur n’existe pas ! [1].
L’Ordinateur voit tout ! L’Ordinateur veut votre bien. L’Ordinateur « est votre ami » [2]. Si jamais vous doutez de cette phrase, ami Clarificateur, veuillez vous présenter au centre d’extermination le plus proche. Ne vous inquiétez pas, l’Ordinateur est là.

Image trouvée sur le site associatif de l Atanière, tous droits réservés

Réédition
Cet univers loufoque se permettait des satires sur la Guerre Froide, sur la religion et sur l’omniprésence de la surveillance technologique (déjà en 1984 pour sa 1re édition). La réédition a édulcoré le côté satirique et vintage des éditions d’origine, sans moderniser les règles pour autant.

Opinion
Le jeu est toujours très drôle et bourré d’humour noir. Le jeu a un peu vieilli et sa tentative de rajeunissement n’est pas forcément très heureuse. J’aimais bien cet ordinateur à la HAL 9000 de 2001 Odyssée de l’Espace. Ici, on a plutôt un Google Home ou un Alexia d’Amazon branché à des Google Glasses. Chacun sa génération. Mais je suis sûr qu’il permettra des heures de rires et d’absurdités. Par contre, je n’ai clairement pas aimé l’utilisation de cartes pour gérer l’initiative. Peut-être que ça aussi, c’est une question de génération.s.

  • Les + : L’univers déjanté, l’humour, le côté non coopératif, la possibilité d’animer rapidement des scénarios one shot.
  • Les - : Peu de missions dans l’édition standard, des règles pas si modernisées que ça et l’intrusion de technologies plus moderne dans le background qui gâche un peu le côté un peu l’ambiance paranoïaque des années 80 sous la Guerre Froide que j’aimais bien.

**MEGA 5e paradigme

Description

C’est le seul jeu un peu space-op’ de ma sélection. Les joueurs sont des messagers galactiques. Les MeGa forment une caste très spéciale qui peut voyager dans différents espaces-temps car ce sont les seuls à pouvoir traverser les tétraèdres. Les tétraèdres sont une sorte de porte interdimensionnelle qui relient les planètes habitées entre elles. Les MeGa ont comme mission de redresser le continuum spatio-temporel pour empêcher que celui-ci ne s’effondre. Ils viendront donc, par exemple, sur Terre au 21e siècle pour empêcher l’élection de Trump ou ils retourneront en 1914 pour empêcher l’assassinat de l’Archiduc François Ferdinand.

Image de la couverture tirée du site de l'éditeur.

Opinion
J’avais joué à quelques parties de MEGA à une époque. J’aimais bien ce jeu car il était très facile d’accès et permettait d’émuler beaucoup d’univers de jeux très différents les uns des autres. Il est parfait pour l’initiation. C’était un peu un jeu très inspiré de l’univers de Valérian et Laureline [3]

  • Les + : L’univers est facile à appréhender pour des newbies. Le potentiel d’aventures est sans limites. Le livre de base est très complet sur l’univers et l’on peut rapidement se lancer sans avoir à acheter d’autres livres. L’écran est aussi d’une grande qualité.
  • Les - : Le changement des règles. Elles deviennent plus originales, mais j’ai l’impression qu’elles se complexifient par rapport aux précédentes éditions. Comme les autres ci-dessus, MEGA est un jeu qui marque son époque et qui n’a pas forcément subi de vrai lifting. Moi qui croyais que la tendance était à la sobriété de la mécanique au profit de l’histoire et de l’univers. Au sujet de l’univers après relecture, je trouve qu’il manque de profondeur et de maturité. En fait, c’est peut-être moi qui ait mal vieilli.

**Bitume

Image tirée du foulancement

Je ne sais plus de quelle édition il s’agit. Bitume devait être un des premiers jeux que j’ai achetés avec mon argent de poche. A priori, ils ont énormément refondu les règles [4]. À l’époque, les règles n’étaient pas prises de tête et allaient à l’essentiel. Le jeu était drôle et il permettait de jouer très vite des personnages caricaturaux dans une ambiance post-apocalyptique à la Mad Max dans la France des années 1980 après le passage catastrophique de la comète de Halley.

  • Les + et les - : Le problème du foulancement, c’est que l’on achète quelque chose en ligne qui n’a pas encore été produit. Voire, qui n’a pas encore été conçu. Le temps de développement peu durer plusieurs années. Sans compter des aléas comme une pandémie mondiale qui bloque l’économie. Donc, je n’ai toujours pas reçu mon exemplaire alors qu’il a été financé il y a un un an déjà.

**Capitaine Vaudou

Image tirée de la page du financement participatif

Encore une réédition d’un jeu mythique. Celui-ci, je n’avais jamais pu y jouer car à l’époque de sa sortie, il y a 18 ans, il a tout de suite été en rupture de stock. Aucun de mes partenaires de jeu ne l’avait en sa possession. Je me rattrape maintenant.
Les joueurs seront immergés dans les Caraïbes à une époque où les pirates et les corsaires écument les mers contre les puissances européennes colonialistes, et où les esclaves se révoltent grâce à la puissance de leur magie vaudou.

  • Les + et les - : Idem que pour Bitume, je ne l’ai pas encore reçu. Ce serait pour l’automne.

Le grand gagnant, c’est l’outsider

Au final, mon choix s’est porté sur... (roulement de tambour)...

Couverture DDP², copyleft Acadamia.org

**Pourquoi Dragon de Poche² ?

Je ne connaissais pas le jeu avant de l’acheter. Je ne l’ai pas acheté pour l’occasion mais quelques temps avant. À l’époque, je cherchais un jeu simple, moderne, facile à déployer, idéal pour une initiation. Dragon de Poche, dans sa deuxième édition, répond parfaitement à cette exigence. Comme pour les jeux de type Donjons & Dragons, seules les règles sont décrites. Comme un jeu bac à sable, l’univers reste à inventer par le meneur de jeu. Tout est possible.

Voici les critères du choix de ce jeu pour nos parties en ligne :

  • Il est court
    Il se présente comme un jeu de rôle complet et très bien documenté dans un livre de poche de 296 pages.
  • C’est du med-fan
    Le Grand Ancien, c’est quand même Donjons & Dragons. Celui avec lequel nous avons le plus joué par le passé et donc celui pour lequel nous avons tous (et surtout mes joueurs) une certaine nostalgie. Dragon de Poche² est une sorte de Donjons & Dragons facilement déployable, dont les règles peuvent être facilement assimilées et permettent d’intégrer tous les clichés du genre. Il y a, tout de même, quelques petites variantes. Dans Dragon de Poche², il n’y a pas d’elfes, mais des sidhes ; pas de nains ou d’orques, mais des ogres ; les dragons sont très présents et la religion n’y est pas manichéenne.
    Nous sommes donc dans un univers médiéval fantastique un peu poétique. Les dragons y ont un rôle important et sont intégrés dans la société. De ce monde de high fantasy découle le fait que toutes les classes de personnages (même les guerriers) maîtrises plus ou moins la magie.
  • Les règles sont modernes et simples
    Il y a des règles simples à déployer, simples à assimiler. Les personnages sont faciles à créer [5]et on peut se lancer dans des parties en très peu de temps. L’univers est très sympathique. L’univers est facilement adaptable à beaucoup d’univers clés en main du marché.
    Comme nous étions un peu rouillés, je n’avais pas envie de règles avec un nombre incalculable de points de détails et de tableaux à n’en plus finir, qui font le bonheur des simulationistes. Je ne voulais pas de règles qui brident le rythme et l’imagination et qui fassent perdre du temps alors que celui-ci nous est de plus en plus compté. [6]
    Mon seul bémol avec Dragon de Poche² est que la magie est vraiment très puissante.
  • Il se joue avec 3 dés à 6 faces
    Seulement 3 dés classiques. Avec 6 faces. Un des 3 dés doit être d’une couleur différente [7].
    Et ça, j’étais sûr que tous mes joueurs possédaient chez eux des dés classiques. Je n’étais pas persuadé qu’ils auraient retrouvé facilement des dés à 10 ou 20 faces si j’avais choisi un autre système.
    Comment marchent ces règles ? Pour résoudre une action incertaine, le joueur jette les 3 dés. On ajoute les compétences de son personnage au résultat et on compare à une difficulté déterminée par le scénario et par le MJ. Si le résultat est au dessus de la difficulté, l’action est réussie. S’il est en dessous, l’action est loupée.

[(Exemple : Gérald veut enfoncer une porte. Il devra tester sa capacité à le faire avec 3d6+FO (il lance 3 dés à 6 faces et ajoute sa capacité en Force). Ce jet va nous donner un score. La difficulté viendra de la porte. Est-ce qu’il veut enfoncer une porte fine en osier d’un poulailler ou une grosse porte massive faite de lourdes poutres de chêne d’un château fort ? La difficulté n’est pas la même. Dans notre exemple, la porte est une simple porte d’étable en bois assez léger. L’action est malaisée. Elle a donc une difficulté de 12. Gérald a +2 en Force et fait un total de 9 avec ses trois dés. Pas de chance ! Il enfonce son épaule contre le bois. La porte ne cède pas mais se fissure et Gérald se fait mal à l’épaule. Va-t-il retenter l’action ou renoncer ?)]

  • Il n’est pas cher
    Effectivement, au temps où les ouvrages de jeux de rôle subissent une poussée expansionnistes due à la stratégie mercatique des foulancements : toujours plus jolis, toujours plus luxueux, avec plus de pages, plus d’illustrations, plus d’extensions, plus d’enluminures... pour attirer les pigeons les consommateurs potentiels [8] Dragon de Poche² n’est pas cher et, pour le coup, il est accessible à toutes les bourses. Donc, si les joueurs de ma table « virtuelle » voulaient se le payer, ils ne devraient pas partir sur une grosse somme. De plus, la version PDF est quand même très pratique lors d’une partie en ligne.

Si vous êtes intéressé [9] vous pouvez trouver DDP² sur Lulu.com (en impression à la demande).

Il y a quand même quelques poins négatifs mineurs :

  • Malgré les apparences, ce n’est pas un jeu pour MJ débutants. DDP² mise énormément sur la capacité d’impro de chacun.
  • Les MJ et les PJ qui manquent d’imagination et qui voudraient approfondir l’univers resteront sur leur faim.
  • Ne convient absolument pas aux simulationnistes.
  • Ne convient pas non plus à ceux qui préfèrent la low fantasy (c.-à-d. un univers moins magique).
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Et vous ? Avez-vous un jour cédé aux sirènes du foulancement ? Quel type de jeu de rôle récent ou réédité vous aurait tenté pour une reprise après 10 ans ? Ou pour un initiation ? Laissez vos commentaires ici.


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